Corespiration

Corespiration est une série de sculptures en verre soufflé. Les œuvres sont constituées de paires de vases soufflés qui semblent se fondre l’un dans l’autre. Dans cette matérialité fluide réside une tentative de représenter l’idée d’une corespiration: deux respirations individuelles qui se rejoignent pour se mouler l’une à l’autre. Dans chaque paire de vases se trouve deux fleurs blanches, l’une d’entre elles baignant dans un liquide bleuté. Peu à peu, la fleur boit la solution et le pigment apparaît sur les pétales, fournissant un marqueur visuel de la progression du temps. Imaginées comme des rencontres contemplatives, les oeuvres du corpus Corespiration visent à engager le public dans une expérience de longue durée qui évoque l’idée d’un rythme de temps partagé.

Le mot corespiration évoque un dialogue ou une relation intime, un événement silencieux mais fondamental, dont le préfixe implique un avec ou un ensemble. Dans le terme co-respiration, le concept de société et celui de respiration semblent se rejoindre. Chaque respiration singulière est enchaînée à la respiration des autres pour former une corespiration, ce que nous appelons société. L’acte de respirer est à la fois le point de départ et le rythme fondamental de cette structure. C’est une perspective très humaine du temps et de la société, qui évoque l’idée d’une réalité commune qui évolue lentement, une respiration à la fois.

Le corpus Corespiration est un ensemble d’interprétations poétiques d’une temporalité vécue et ressentie. Face à l’impossibilité de concevoir une respiration réciproque avec l’autre au présent, Roch-Cuerrier a tenté d’imaginer, par la proximité et l’interaction de ces formes soufflées, un futur où l’autre est plus proche. À travers les différentes formes et assemblages créés, l’artiste a voulu illustrer différents modes de dialogue et d’interaction. Bien que les récipients agissent comme des objets individuels, ils existent dans une réalité partagée les uns avec les autres: l’œuvre ne prend tout son sens qu’à travers leur assemblage.

Conceptuellement, le projet s’inspire d’une série de discussions que Roch-Cuerrier a entretenues au cours des dernières années avec la commissaire Joséphine Rivard. À l’automne 2019, de manière à rassembler et à perpétuer ce dialogue, elles ont initié une correspondance écrite. Au fil des échanges, plusieurs sujets se sont intimement liés à la définition qu’elles ont construite autour de la corespiration: féminisme, écoféminisme, éthique du care, mutualisme. Au printemps 2020, un extrait de leur correspondance a été publié sur la plateforme numérique Résidence Éditions. Cette opportunité de partager leurs idées avec un public plus large leur a permis d’accentuer la dimension ouverte et continue de ces idées, et d’inviter les lecteurs à réfléchir à leur tour.